A Chennai, d’abord, nous avons pu profiter de la folle agitation, des bazars où se croisent buffles et pousses-pousses et d’un réseau de bus citadin digne des meilleurs labyrinthes !

Mais nous en avons réchappé et entre deux bouffées d’échappement nous avons même pu nous mettre au vert. Ce fut notamment le cas au «theosophical garden», dans lequel ont élu domicile des centaines de chauves-souris géantes, non loin d’un immense «banian», cet arbre qui semble pousser à l’envers et dont les branches couvrent près de 100m2 !


Puis, après la gigantesque Chennai, nous traversons l’état de l’Andhra Pradesh pour arriver dans celui du Telangana, et sa capitale Hyderabad (7 millions d’habitants). Pour cela il nous aura fallut parcourir 700km en 14h de train, soit une vitesse moyenne de... 50km/h ! Pas mécontents d’être arrivés !

A noter, les trains indiens offrent de parfaits terrains de jeux aux voyageurs repus de temps mais affamés d’aventure : par exemple, une ligne directe Chennai-Benarès (37h!) ou encore Bombay-Cap Comorin (45h!!). 


Mais cela dit, et par expérience, je crois qu’il est aussi pertinent pour celui qui désire connaître l’Inde de traverser ses gares et fréquenter ses trains que de visiter ses monuments. Car c’est à mon sens là que bat aujourd’hui son cœur, là que se trouve l’Inde du présent. 

D’abord parce que, sans compter les fraudeurs, 20 millions d’indiens compostent un billet chaque jour. Ensuite parce que passer une dizaine d’heures en catégorie sleeper, dans des compartiments sans fenêtres de 8 couchettes séparés entre eux par un couloir tout ouvert, ben c’est comme si on partageait d’abord une salle à manger, puis une chambre à coucher, avec des inconnus que l’on finit bien souvent par apprécier. Et puis enfin, quel kiff, depuis sa couchette, d’apercevoir un ciel étoilé, d’observer l’Inde qui s’endort tout en sachant qu’elle ne le sera jamais tout à fait. Quel kiff, aussi, au milieu de la nuit, d’aller se pencher à travers la porte ouverte, distinguer, au loin, le wagon de queue, le wagon de tête, se régaler de ces villages que la locomotive semble couper en deux sous nos yeux, les traverser comme dans leur intimité, avec des scènes de vie prompt à nous combler. Moins réjouissant, cependant, ces vendeurs de thé traversant les wagons en hurlant « chaï, chaï », dès 6h du matin...


Pour ce qui est des gares c’est un mix entre la cour des miracles et le musée des horreurs, des unijambistes qui sautent de quai en quai, des «culs de jatte» sur des planches à roulettes, des estropiés qui nous tendent leurs moignons en espérant une pièce...

Enfin nous voici donc à Hyderabad où régnèrent il y a quelques siècles deux dynasties de sultans d’une richesse fabuleuse. On recense donc aujourd’hui encore à travers la cité de magnifiques palais, tombeaux et mosquées, ainsi qu’une forteresse très, très imposante. Mais Hyderabad c’est aussi un quartier hi-tech, symbole de cette Inde qui grandit vite, et surtout les plus grands studios de cinéma du monde ! Ces derniers accueillent ainsi les grosses productions locales, en langue telougou, mais également des productions tamoules ou encore hindi. Nous y passerons une journée complète, explorant en bus une infime partie des 670 hectares du site (!), ses attractions, ses incroyables décors en plâtre, ses villages fictifs pourtant si bien réalisés... De quoi mieux comprendre toute la magie du cinéma, dans un pays où il est roi. 

Enfin, Hyderabad, majoritairement hindoue, recense une très forte communauté musulmane (ainsi que des sikhs, jaïns, chrétiens...) et figure à nos yeux de français le meilleur exemple de tolérance et de vivre-ensemble que l’on ait pu observer. Ici pas de laïcité (oula non jamais !) mais une ville qui, notamment par ses infrastructures sait s’adapter au culte de chacun, et sans que quiconque ne semble dérangé.

Allez, on poursuit notre ruée vers le nord, direction Aurangabad et les grottes d’Ellora et d’Ajanta, classées au patrimoine mondial de l’UNESCO.

Auparavant il nous faudra faire 19h de train pour couvrir à peine plus de 500km. Départ 21h35, arrivée 16h15, 26km/h de moyenne, la prochaine fois on prendra les vélos...